Faute, mise à pied, entretien préalable
Mise à jour : 01 février 2021Sauf poursuites pénales, l'employeur qui a connaissance d'un fait fautif a deux mois au maximum pour engager la procédure disciplinaire. Au-delà, les fautes sont prescrites et ne peuvent plus, à elles seules, donner lieu à une sanction. Lorsque l'employeur entend licencier un salarié pour faute grave, il doit engager la procédure dans un délai restreint.
Quel est le délai à respecter s'il s'agit d'une faute grave ?
S'il s'agit d'une faute grave, l'employeur doit agir le plus vite possible dans un « délai restreint » (Cass. soc., 6 oct. 2010, no 09-41.294).
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Si l'employeur attend, c'est que le maintien du salarié dans l'entreprise n'est pas impossible, la faute grave peut alors être requalifiée et considérée par les juges comme une faute plus mineure.
Quel est le point de départ du délai de deux mois ?
Le point de départ du délai de deux mois est le jour où l'employeur (ou le supérieur hiérarchique direct du salarié) a eu connaissance de la faute. C'est-à-dire le jour où il a eu une information précise et complète des événements.
Ainsi, lorsque des vérifications et investigations sont nécessaires pour établir avec certitude les faits, le point de départ du délai de deux mois peut se trouver reporté jusqu'au jour où l'employeur dispose de l'ensemble des informations (Cass. soc., 7 déc. 2016, no 15-24.420).
Quelle action doit avoir accompli l'employeur au bout de deux mois ?
Dans le délai maximal de deux mois, l'employeur doit avoir engagé des poursuites disciplinaires, c'est-à-dire :
- avoir convoqué le salarié à l'entretien préalable au licenciement. C'est la date de convocation à l'entretien préalable qui marque l'engagement des poursuites (Cass. soc., 5 févr. 1997, no 94-44.538)
- ou avoir notifié une mise à pied conservatoire. Si elle est notifiée dans le délai de deux mois, le licenciement peut intervenir ultérieurement (Cass. soc., 13 janv. 1993, no 90-45.046).
C'est la date de convocation à l'entretien préalable qui compte, même en cas de procédure disciplinaire conventionnelle imposant à l'employeur de convoquer un conseil de discipline (Cass. soc., 18 janv. 2011, no 09-43.079).
Quelle est l'incidence d'un arrêt maladie ou d'un accident du travail sur le délai de deux mois ?
Aucune. Le délai de deux mois n'est pas interrompu par la suspension du contrat de travail, quel qu'en soit le motif (arrêt pour maladie (Cass. soc., 25 oct. 2007, no 06-42.493) comme un arrêt suite à un accident du travail (Cass. soc., 17 janv. 1996, no 92-42.031)).
Le salarié peut donc bien être convoqué à un entretien préalable au licenciement pendant un arrêt de travail pour maladie. Toutefois, si la maladie a une origine professionnelle Est due à un accident du travail ou une maladie professionnelle , il ne peut pas être licencié pendant cet arrêt pour un motif autre qu'une faute grave ou une impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou la maladie professionnelle.
Concrètement, comment calculer les deux mois ?
Le délai de deux mois se calcule de quantième en quantième et expire le dernier jour à minuit.
Si le dernier jour du délai est un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le terme du délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.
Quelle est l'incidence de poursuites pénales sur ce délai ?
Des poursuites pénales contre le salarié interrompent le délai de deux mois (Cass. soc., 6 déc. 2000, no 98-45.772).
Il peut s'agir d'un acte qui émane de l'employeur ou de la victime (CE, 10 juill. 2019, no 408644), dès lors que l'effet est de mettre en mouvement l'action publique (Cass. soc., 12 janv. 1999, no 98-40.020) : par exemple, une plainte avec constitution de partie civile de la part de l'employeur ou une citation directe de la victime.
Le délai de deux mois court alors à compter :
- de la décision pénale définitive La décision est considérée comme définitive lorsque le délai de 2 mois pour faire appel a expiré ou qu'il n'y a plus de recours possible. , si l'employeur est partie au procès pénal (Cass. soc., 6 déc. 2000, no 98-45.772)
- à compter de la date de connaissance par l'employeur de l'issue définitive de la procédure pénale La décision est considérée comme définitive lorsque le délai de 2 mois pour faire appel a expiré ou qu'il n'y a plus de recours possible. , dans le cas contraire (Cass. soc., 15 juin 2010, no 08-45.243).
L'employeur n'est pas obligé d'attendre l'issue de la procédure pénale en cours pour notifier un licenciement (Cass. soc., 26 janv. 2012, no 11-10.479).
Quelle est l'incidence de la conclusion d'une rupture conventionnelle ?
La conclusion d'une rupture conventionnelle n'interrompt pas le délai de deux mois. Ainsi :
- si l'employeur et le salarié concluent une rupture conventionnelle avant que la procédure disciplinaire n'ait été engagée, puis que le salarié exerce son droit de rétractation alors que le délai de deux mois est écoulé, l'employeur ne peut plus engager de procédure disciplinaire à l'encontre du salarié (Cass. soc., 3 mars 2015, no 13-23.348)
- si la procédure disciplinaire a déjà été engagée lorsque la rupture conventionnelle est conclue, puis que le salarié exerce son droit de rétractation, l'employeur peut reprendre la procédure disciplinaire précédemment initiée, par la convocation du salarié à un nouvel entretien préalable. Il faut toutefois que le délai de prescription de deux mois ne soit pas expiré (Cass. soc., 3 mars 2015, no 13-15.551).
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Procédure de licenciement pour faute simple

Procédure de licenciement pour faute grave ou lourde

En revanche, le délai n'est pas interrompu par une simple plainte, ni par l'ouverture d'une enquête préliminaire diligentée par le procureur de la République (Cass. soc., 13 oct. 2016, no 15-14.006).
Si le salarié est relaxé au pénal sur les faits qui constituent les griefs de la lettre de licenciement, celui-ci sera déclaré sans cause réelle et sérieuse par le conseil de prud'hommes (ou la cour d'appel) (Cass. soc., 7 nov. 1991, no 90-42.645).
Lorsque les faits reprochés au salarié donnent lieu à l'exercice de poursuites pénales, l'employeur peut décider de ne pas le licencier immédiatement, et prononcer une mise à pied conservatoire pour la durée de la procédure dirigée à son encontre (Cass. soc., 6 oct. 2016, no 15-15.465). Si les faits reprochés au salarié sont clairement établis, l'employeur pourra procéder à son licenciement. À l'inverse, si ces faits ne sont pas avérés, le salarié pourra obtenir les salaires qu'il aurait dû percevoir pendant toute la durée de la mise à pied.
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1119 du 27 mai 2009, Pourvoi nº 06-46.293
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2177 du 25 octobre 2007, Pourvoi nº 06-42.493
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 89 du 17 janvier 1996, Pourvoi nº 92-42.031
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3750 du 9 octobre 2001, Pourvoi nº 99-41.217
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 4913 du 6 décembre 2000, Pourvoi nº 98-45.772
Conseil d'État, Chambres réunies, Décision nº 408644 du 10 juillet 2019
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 164 du 12 janvier 1999, Pourvoi nº 98-40.020
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1794 du 13 octobre 2016, Pourvoi nº 15-14.006
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1255 du 15 juin 2010, Pourvoi nº 08-45.243
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2276 du 29 mai 1990, Pourvoi nº 87-40.151
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 323 du 26 janvier 2012, Pourvoi nº 11-10.479
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1821 du 2 mai 2001, Pourvoi nº 98-45.894
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1720 du 6 octobre 2016, Pourvoi nº 15-15.465
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 391 du 3 mars 2015, Pourvoi nº 13-23.348
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 390 du 3 mars 2015, Pourvoi nº 13-15.551
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3745 du 7 novembre 1991, Pourvoi nº 90-42.645
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 197 du 18 janvier 2011, Pourvoi nº 09-43.079
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 604 du 5 février 1997, Pourvoi nº 94-44.538
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 126 du 13 janvier 1993, Pourvoi nº 90-45.046
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1751 du 6 octobre 2010, Pourvoi nº 09-41.294
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2272 du 7 décembre 2016, Pourvoi nº 15-24.420
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3383 du 10 juillet 2001, Pourvoi nº 98-46.180